mardi 20 mars 2012

Heureux ceux avec les bonnes priorités

par Ralph Blair
le deuxième des trois sermons donnés en Octobre 2011
au Festival de prédication d'Evangelicals Concerned

Jésus a dit :

Heureux ceux qui sont humbles, car Dieu leur donnera la terre en héritage.

UN DESSIN HUMORISTIQUE dans le New Yorker illustre un pauvre type nouvellement arrivé aux portes du Paradis. St. Pierre examine l’écran de son ordi et lui dit : « Vous me dites ‘humble’, mais les archives indiquent ‘passif-agressif’ ».

On interprète mal le sens de l’humilité. Les humbles, sont-ils simplement timides ? ou des mauviettes ? « L’humilité » est-elle simplement un stratagème pour l’autodéfense ? Est-ce juste une moue – un plan calculé pour obtenir ce qu’on veut ? Une certaine timidité a peut-être l’intention d’intimider. Ou peut-être s’agit-il d’un trouillard. Mais tous ceux indiquent un manque de l’humilité dont Jésus parlait.

Jésus incarne lui-même l’humilité dont il parle. Comme l’a écrit Paul sur Jésus aux Philippiens, « le Christ n’a pas cherché à profiter de l’égalité avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, prenant la condition d’un serviteur ». (Phil 2:6-7) En entrant dans Jérusalem le premier dimanche des Rameaux, on le décrit comme doux, humble, et monté, non sur un grand cheval comme un général triomphant, mais sur un ânon. (Matt 21:5) Et n’a-t-il pas soulagé ceux accablés d’un lourd fardeau avec ces mots apaisants : « Venez à moi, je vous donnerait du repos. Prenez mon joug sur vous. Apprenez de moi, car je suis doux et humble de cœur – et vous trouverez le repos pour vous-mêmes, car mon joug est facile à porter et la charge que je vous impose est légère. » (Matt 11:28-30) Il s’abaisse jusqu’à nous.

L’histoire des religions et des superstitions du monde ainsi que nos propres histoires personnelles nous enseignent que les règles, les rituels et tous les autres obligations de religion, de légalisme et de soi-disant spiritualités peuvent piéger voire tuer. Jésus le savait, lui aussi. Ses oppresseurs étaient des chefs religieux, excessivement critiques, qui ont comploté pour le tuer parce qu’il ne s’est pas laissé tromper par eux. Il prêchait contre la façon qu’ils avaient accablé les gens avec de pesants fardeaux sans lever le petit doigt pour les aider. (Matt 23:4) Pierre et Paul ont continué à cet égard, comme nous le voyons dans le discours de Pierre au Concile de Jérusalem (Actes 15:10) et dans les lettres de Paul (par exemple, Romains 7:10, 24-25). Au lieu du joug écrasant de la Loi sous lequel Pierre a dit que ni eux ni leurs ancêtres n’avaient jamais eu la force de porter, Jésus nous invite de prendre son joug sur nous. Quel que soit la tâche, ce sera tellement plus facile avec lui à côté de nous. Oh, le joug de Jésus constitue un massage pour les cous et les épaules fatigués !

Jésus dit que les humbles hériteront la terre. Comment ça ? Eh ben, n’est-ce pas nos soucis terrestres auxquels la plupart d’entre nous nous inquiétons la plupart du temps ? Nous nous inquiétons ici et maintenant à notre futur ici et alors. Et si ceci se produit ? Et si cela se produit ?!! Nos soucis terrestres, tous nos spéculations, s’allongent fantastiquement devant nous, à l’infini et ad nauseam.

Pourtant, Jésus a dit : ne vous inquiétez pas pour la moindre de ces choses de votre vie quotidienne – ce que vous allez manger, ce que vous allez porter, « si seulement » ceci, « si seulement » cela. Il a noté que « Les païens se préoccupent sans cesse de toutes ces choses ! » Il leur a donc demandé : « Ne savez-vous pas que votre Père, qui est aux cieux, sait que vous en avez besoin ? » Ce seul mot devrait suffire aux sages ! Il a donc enseigné : « Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu ; et toutes ces choses vous seront données en plus ». (Matthieu 6)

Sans une bonne raison pour cesser de s’inquiéter, on ne peut pas. Jésus nous donne donc de loin la meilleure raison pour ne pas nous inquiéter. Ce qu’il dit a du sens, non ? Nous pouvons nous permettre de cesser de nous inquiéter parce que Dieu est clairement déjà conscient de nos besoins et nous donnera ce dont Il sait, dans sa sagesse incompréhensible et dans son amour incontestable, nous avons besoin. Mais comment savons-nous qu’Il le fera ? Nous le savons parce que, quand nous sommes dans notre besoin le plus urgent, il était déjà allé à la croix. Avec une telle assurance de Son amour, nous pouvons nous permettre de cesser de nous inquiéter. Avec cette assurance, devrons-nous vraiment insister pour que tout aille selon nos souhaits ? Faut-il que tous nos vœux soient exaucés et faut-il nous enfuir de tous nos fantasmes ? Sommes-nous incompréhensiblement sages ? Sommes-nous incontestablement aimants ?

Donc, attelés avec Jésus, votre stress est détendu chaque jour alors que vous avancez avec lui à vos côtés. Comment ? Son joug masse votre stress.

Et si, en tant que l’un des spirituellement pauvres, vous faites déjà partie du royaume juste de Dieu, n’est-il pas certain que tout ce dont vous avez besoin de Lui, vous en recevrez aussi ?

Dépassant de loin le vieil espoir d’une terre promise, Jésus promet le monde entier – un tout Nouveau Monde, le royaume cosmique, complètement racheté, sous le souverain règne de Dieu.

Etes-vous en deuil pour votre propre péché ? Réjouissez-vous du salut du péché et de la mort. Souffrez-vous parce que les autres ont péché contre vous ? Réjouissez-vous du salut du péché et de la mort. Votre dette a été payée et la leur aussi – payée sur la croix. Soyez humble et imperturbable, reconnaissant parce que les rachetés n’ont pas besoin de se donner des airs, pas besoin de ressentiment ni de vengeance. Les rachetés ont raison de se réjouir du Sauveur. Soyez attelé au joug avec lui qui a renoncé son égalité avec Dieu pour être attelé au joug avec vous. Et attelé avec lui, soyez attelé au joug avec les autres pour qui, eux aussi, il a renoncé son égalité avec Dieu. Prenez les choses comme elles viennent, de jour en jour, parce que vous vous rendez compte qui est à vos côtés à travers tout. C’est votre Créateur à vos côtés. C’est votre Sauveur attelé au joug avec vous. Et c’est également leur Créateur, Sauveur et Seigneur. Avec Lui, son Nouveau Monde est le vôtre et le leur aussi. C’est comment et pourquoi nous pouvons être humbles. Nous sommes attelés au joug avec Jésus, celui qui est venu être attelé avec nous à travers tout l’enfer que nous n’aurons jamais affronter, puis jusqu’à un tout nouveau monde. Partager son joug détruit notre orgueil insensé et nous donne un cœur tendre et humble et joie docile. Nous chantons donc dans la doxologie : « Doté donc d’un cœur tendre, prenez votre part en pardonnant autrui. Chantez ses louanges, Alléluia ! Alléluia ! Alléluia ! »

Et Jésus a aussi dit :

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, cars ils seront rassasiés !

Comme le chante le Psalmiste : « Comme un cerf qui soupire après l’eau des ruisseaux, de même je soupire après toi, ô mon Dieu. » (Ps 42:1) Et encore : « Le Seigneur a désaltéré les assoiffés, il a comblé de biens les affamés ». (Ps 107:9)

Mais alors que nous entendons ces mots anciens, il ne faut pas nous leurrer. Nous, ici et maintenant, n’avons jamais connu la soif réelle. Nous n’avons jamais connu la faim réelle – comme les gens du monde ancien connaissaient la faim et la soif et comme les gens du tiers-monde et du quatrième-monde connaissent la faim et la soif aujourd’hui.

Quand nous étions assoiffés, il est probable que ce n’était pas la soif réelle. Nous étions d’habitude à quelque pas de l’eau de robinet, sinon l'eau de source embouteillée du Fidji ou de la Finlande. Quand nous disons : « Je crève de faim ! », nous nous leurrons. Nous avons sans doute mangé il y a pas plus de quelques heures, et notre repas prochain sera d’ici quelques minutes.

Mais les gens de l’époque biblique dans le Moyen-Orient aride connaissaient les crampes d’estomac, l’épuisement, l’atrophie musculaire – et pire – de la faim totale. Et ils connaissaient les douleurs des crampes et des maux de tête sévères – et pire – de la déshydratation sévère. Sans secours, ils sont morts de faim en moins de quelques semaines. Sans secours, ils sont morts de soif en moins de quelques jours.

Et alors, quand Jésus parle de la bonne fortune de ceux qui « ont faim et soif de la justice », il faut nous efforcer d’entendre ce qui a été originairement entendu. Si nous ne le faisons pas, nous penserons à tort que la bonne fortune est liée aux miettes maigres d’une ‘spiritualité’ qui n’exige rien. Accroché aux amuses-bouches de pharisaïsme, on ne peut guère avoir faim du repas copieux de justice (Matthieu 5 :20)

Ce dont Jésus parlait était la vraie urgence de ceux qui savent qu’ils ont un besoin urgent des rudiments de la vie elle-même – que leur besoin est une question de vie ou de mort. Voilà l’urgence avec laquelle les heureux qui cherchent à être remplis poursuivent la condition de disciple pour se fier à et pour obéir au Seigneur. C’est là leur conscience de leurs propres incapacités et de leur dépendance absolue de Dieu seul. Et, bien sûr, la faim et la soif sérieuses de la justice du Dieu par qui et à l’image de qui ils ont été créés, et par le Fils de qui ils sont rachetés, seront, effectivement, complètement assouvies. Rien d’étonnant à ce que la faim et la soif de Lui et de Sa justice soient si épanouissantes, portent tant de bonheur !

Sommes-nous poussés par une telle faim et soif de Sa justice, d’une intimité croissante avec Lui ? (2 Cor 13:14)

Et Jésus a aussi dit :

Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde !

Avant d’être abattu dans un hôtel new-yorkais en 1990, le rabbin Meir Kahan, fondateur de la Ligue de Protection Juive, classé par le FBI comme « organisation terroriste d’extrême-droite », a cyniquement prétendu que « La miséricorde a sa place, de même que la cruauté et la vengeance ». Et depuis des siècles, il n’a pas été le seul à l’affirmer. Des appétits féroces pour la vengeance et pour la cruauté viennent facilement à ceux qui se focalisent sur les torts qu’on leur a causés plutôt sur les torts qu’ils causent à autrui.

Mais la vengeance et la cruauté ne peuvent pas être les bonnes réponses pour un disciple du Christ ! Pourquoi ? C’est parce que ceux auxquels Dieu, celui qui est parfaitement saint, donne tant de miséricorde, ne peuvent que chercher à être miséricordieux à tous les autres dans un esprit d’humble gratitude. La miséricorde n’est pas due. La miséricorde n’est pas méritée. La miséricorde est un don pour ceux qui méritent la punition – voire la mort. C’est pourquoi nous qui avons reçu la miséricorde du Christ de la croix pouvons montrer une telle miséricorde, même aux ennemis.

Si nous refusons d’aider autrui après avoir reçu de telle miséricorde, jusqu’à quel point comprenons-nous vraiment ce que le Christ a fait pour nous ? Si Dieu a tourné le dos à lui-même, en forme de son Fils, de telle sorte à ne jamais devoir tourner le dos à nous – comment pouvons-nous tourner le dos à autrui, même s’ils nous ont tourné le dos ?

Rien d’étonnant à ce que les miséricordieux soient si heureux ! Leur manifestation de miséricorde montre qu’ils savent ce que c’est que de recevoir la miséricorde de Dieu. Leur miséricorde découle de celle que Dieu leur a montrée. C’est en fait la même miséricorde.

Les érudits bibliques font remarquer que, dans l’Ancien Testament grec, à la différence du grec non-biblique, « montrer de la miséricorde » – hilaskomai – est sans égal parmi les païens ». (Nigel Turner) L’idée centrale de la miséricorde dans la Bible, c’est le pardon. La miséricorde ne portait plus sur superficiellement pacifier les dieux païens en manipulant le public avec magique. Il ne s’agissait plus d’un prêtre païen amenant les dieux à se sentir redevables à nous. La miséricorde et le pardon bibliques portaient sur un acte bienveillant de Dieu seul. Et, progressant vers le Nouveau Testament, cet acte bienveillant de la miséricorde de Dieu était historiquement vécu sur la croix du Calvaire, même jusqu’à la mort.

Et alors, nous les disciples du Christ pouvons nous permettre de cesser d’être obsédés par les torts faits à nous en concentrant à nouveau sur les torts que nous faisons à autrui, et sur les torts innommables que nous avons faits à Dieu qui, en Christ, a pris la punition de nos péchés dans Lui-même, souffert et mort pour que nous puissions non seulement survivre mais prospérer. Nous pouvons fixer nos yeux sur le Crucifié et voir notre seul salut en lui.

Comme dans toutes les Béatitudes, Jésus parle à ses disciples – ceux qui, dans leur bon sens de pauvreté spirituelle, dépendent complètement de Dieu seul, et ainsi, sont des citoyens du royaume de Dieu. Jésus parle à ceux qui, déplorant leurs propres torts et ceux d’autrui, se tournent vers Dieu et sont réconfortés ainsi. Et il parle à ceux qui, en désirant profondément une relation plus fidèle avec Dieu, sans ne guère se soucier de désobéissance et alimentés par la fidélité, font des prières qui sont entendues et exaucées.

Si nous sommes reconnaissants d’avoir reçu le pardon, nous désirons vivement pardonner. Si nous ne savons pas ce que c’est que de recevoir le pardon, nous n’allons pas probablement pardonner autrui. Mais certains qui ont reçu le pardon refusent de pardonner. Jésus a raconté une parabole d’un tel homme. On avait pardonné une dette énorme qu’il avait due. Mais alors il a refusé de pardonner une petite dette que un autre homme lui devait. Jésus a indiqué que sa parabole portait sur le royaume de Dieu, et a prévenu que, vu la grande miséricorde que Dieu nous fait, ce serait une tort scandaleuse si nous refusions de faire miséricorde à autrui. (Matt 18:21ff) Puisque la Béatitude est adressée aux disciples du Christ, notre empressement à transmettre cette miséricorde à autrui, en tant que ses disciples, résulte du fait d’avoir déjà reçu le pardon de Dieu. La promesse rassurante de la Béatitude c’est que je confirme ma réception du pardon de Dieu quand moi-même, je pardonne. Heureux les miséricordieux !

Jésus a aussi dit :

Heureux ceux dont le cœur est pur, car ils verront Dieu !

Les purs ce sont ceux qui aime et servent Dieu de tout cœur. Leur dévouement à Dieu est pur et résolu.

Dans la pensée hébraïque, le cœur a représenté le moi, la vie, l’esprit – l’essence – le centre d’un être humain. Avoir un cœur pur, c’est donc vivre, en plein cœur de son essence, une vie d’intégrité, une vie qui est tout à fait intégrée, d’une seule pièce, sans réservations, sans intendance mesquine, sans loyautés en concurrence, sans idoles, sans d’autres « dieux », point final.

Le cœur, comme Jésus le savait, est le centre par lequel on pense et parle, a des intentions et agit. Il ressort donc du cela que ceux dont le cœur est pur sont ceux qui aiment et servent Dieu avec tout ce qu’ils ont. Ils aiment Dieu avec tout ce qu’ils possèdent et dans tout ce qu’ils font – l’essence du premier Commandement. Et si oui, ils aiment leur prochain comme eux-mêmes, comme Jésus a résumé la Loi de Dieu. (Marc 12:29f) Dans leur suite de Jésus, ils n’ont aucun souci sauf la volonté de Dieu. Ils n’ont pas d’obligations en concurrence, pas d’intérêts contradictoires, pas compartimentage de leur identité ‘chrétienne’ et ‘d’autres’ identités. Ils accordent toute leur attention à la volonté de Dieu seul. Les priorités de Dieu sont leurs priorités. Ils désirent vivement être conformés à l’image du Christ.

Amy Carmichael a été missionnaire en Inde pendant plus un demi-siècle. Elle n’est jamais allé en vacances. Un jour elle a reçut une lettre qui lui demandait de décrire la vie missionnaire. Sa réponse pratique : « C’est simplement une occasion de mourir ». Quelque-chose d’autre qu’elle a écrit : « Heureux ceux dont le cœur n’est pas divisé, parce qu’ils auront beaucoup de paix. Si vous refusez d’être bousculé ou pressé, si vous confiez votre âme complètement à Dieu, rien ne peut vous priver de la clarté d’esprit qui est la vie et la paix ». Elle a fait partie des heureux – un disciple du Christ de pur dévouement et de pure joie.

Est-ce bizarre que ceux dont le cœur est pur, qui comptent si diligemment et si fidèlement sur Dieu seul, peuvent le voir ? L’auteur de l’épître aux Hébreux se réfère à Moïse, qui est allé de l’avant par la foi, « en homme qui voit le Dieu invisible ». (Hébreux 11:27) Et comme l’a dit Jean : un jour, il y aura une grande Réunion où ceux dont le cœur est pur « le verront tel qu’Il est », car ils seront eux-mêmes « semblables à Lui ». (1 Jean 3:2) Après tout, ceux-là qui vivent maintenant avec pureté de cœur sont ceux dont le cœur a été purifié par Dieu en Christ. Comme nous le lisons dans la Révélation Du Seigneur à Jean à l’île de Patmos, ils sont les purifiés. « Ils ont lavé et blanchi leurs tuniques dans le sang de l’Agneau ». (Rév 7:14)

Et maintenant, sachant qui ils sont et à qui ils s’appartiennent, ayant faim et soif de plus de sa justice et transmettant aux autres la grâce que Dieu leur a accordée – heureux ceux avec les bonnes priorités, ceux dont le Privilège est le Christ lui-même.

Amen.

© 2011 par Ralph Blair. Tous droits réservés.
(traduction : FW)

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